Vous me direz, encore des peintures au carré ! Et oui, après les portraits, maintenant les paysages au carré. Cela veut-il dire que je tourne en rond ? Je dois avouer que ce format me plait particulièrement. C’est peut-être l’envie de sortir des formats conventionnels. Sans doute aussi compte tenu de ma fainéantise, un format carré m’en fait moins à peindre sur les côtés ! Mais non, je plaisante. Ce que je peux dire en tout cas, c’est que le format vertical pour un paysage (à la française) est un cadre qui ne m’inspire pas trop. Ce qui peut me séduire à la limite, ce sont les formats verticaux où le rapport largeur/hauteur serait très différencié. Mais les sujets de paysages susceptibles de se composer dans de tels formats sont un peu plus rares. Chinois et Japonais s’y sont confrontés merveilleusement. Je les laisse tout à leur art.
Pour cette galerie, des sujets simples, habituels. Quelques arbres, un coin de champ ou de forêt lors de balades, un chemin, quelques ambiances saisies au lever du soleil en campagne. Voilà pour mon univers. Pour la technique, certains visuels sont réalisés à la gouache, d’autres à l’huile. Cherchez à les différencier si ça vous amuse.
Paint-maton
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Quel plaisir que de retrouver la simplicité de la gouache. Elle est souvent oubliée, méprisée même car elle rappelle les années scolaires, les heures de peinture autrefois sous l’œil bienveillant, mais parfois incompétent, du maître ou du prof de géographie ou d’histoire. Ces matinées ou après-midi étaient beaucoup moins l’expression d’une grande créativité que le moment de défouloir pour le plus grand nombre. On sortait alors sa boite de gouaches, en godets ou pastilles et sa pochette de papier Canson. Les mieux équipés possédaient leurs gouaches en tubes et faisaient figure de privilégiés. La différence matérielle opérait déjà une fracture entre les plus doués et les autres.
Ce sont bien des souvenirs enfouis qui surgissent à l’utilisation de la gouache. Ce qui me revient souvent en tête, ce sont les faibles moyens accordés à la peinture, au matériel lui-même. Quand une couleur était épuisée, je faisais sans, jusqu’à ce que ça ne devienne plus tenable. C’était toujours le blanc qui manquait en premier. Il fallait que je négocie avec mes parents pour acheter quelques tubes, un peu de papier. Cette fourniture créative n’étant pas la plus indispensable. J’avais donc toujours le temps d’attendre un peu. J’ai aussi en tête, l’image du bocal d’eau nuageuse qui se renversait sur la peinture, toujours au dernier moment.
Il y a une délectation toute naturelle à jouer librement avec la matière et sa couleur.
En commençant mes autoportraits à la gouache, je me suis fait plaisir sans trop de contraintes techniques. De la couleur, de l’eau et du papier. Des ingrédients d’un grand commun. J’ai étalé de la couleur sans me soucier de la gestion du temps de séchage qu’impose l’huile. Ça soulage l’esprit. Ce qui m’a vraiment impressionné en découvrant les gouaches qu’un ami avait réalisées, c’est leur aspect mat, véritablement velouté. Il s’en dégage une douceur, une sensualité très charnelle. C’est une impression que je n’avais pas perçue auparavant. Et cela ne se ressent pas du tout à travers des reproductions. Comme quoi, voir un original apporte une dimension qui fait appel à d’autres sens que celui de la vue.
Cette série d’autoportraits, n’est pas la manifestation d’un égo surdimensionné, mais plutôt le fait qu’il n’y a pas plus simple de poser soi-même devant un miroir pour travailler le portrait. Par contre, se voir autrement que de face est une réelle difficulté face au miroir. Il sera facile au visiteur d’identifier le portrait qui est réalisé à partir d’une photo. Je ne reviendrai pas sur la sempiternelle “question du sourire” sur les autoportraits. Remarque ayant été déjà tellement traitée.
Femme
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Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'ai pas connues
Je t'aime pour tout le temps
Où je n'ai pas vécu
Pour l'odeur du grand large
Et l'odeur du pain chaud
Pour la neige qui fond
Pour les premières fleurs
Pour les animaux purs
Que l'homme n'effraie pas
Je t'aime pour aimer
Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'aime pas
Qui me reflète sinon toi-même
Je me vois si peu
Sans toi je ne vois rien
Qu'une étendue déserte
Entre autrefois et aujourd'hui
Il y a eu toutes ces morts
Que j'ai franchies
Sur de la paille
Je n'ai pas pu percer
Le mur de mon miroir
Il m'a fallu apprendre
Mot par mot la vie
Comme on oublie
Je t'aime pour ta sagesse
Qui n'est pas la mienne
Pour la santé je t'aime
Contre tout ce qui n'est qu'illusion
Pour ce cœur immortel
Que je ne détiens pas
Que tu crois être le doute
Et tu n'es que raison
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Je t'aime (Paul Eluard)
Mugshots
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Les “mugshots” ou photos d’identité judiciaire ne datent pas d’aujourd’hui et sont consécutives à l’invention de la photographie. Lors de la conquête de l’Ouest, Allan Pinkerton fut le premier à utiliser les portraits des bandits et autres délinquants sur les fameuses affiches “wanted”. La photo s’est avérée rapidement insuffisante pour décrire un individu. Elle ne définit que les aspects physiques à travers l’image. À la fin du XIXe siècle le français Alphonse Bertillon met au point l’identification anthropométrique. Elle vient accompagner, surtout compléter par une indexation exhaustive, les détails qui vont permettre de reconnaître une personne sans risque d’erreur, notamment le risque de méprise avec un sosie.
Selon les pays, les époques, on trouve des mugshots de différentes factures. Souvent portrait face et profil. Parfois un portrait doublé d’une pose en pied en habits de ville.
C’est à partir de ces fiches d’identité historiques (d’origine australienne) que j’ai réalisé ces portraits, pour la plupart en noir en blanc ou sépia. L’époque que j’ai retenue est comprise entre 1920 et 1930.
(Il existe aujourd’hui sur internet un véritable trafic crapuleux à propos des “mugshots”. Des sites ont référencé les fiches et photos de milliers de détenus ou de personnes ayant fait l’objet d’une simple identification policière. Ces sites réclament plusieurs centaines ou milliers de dollars lorsque l’intéressé souhaite faire disparaître son portrait d’internet. C’est un véritable chantage. À contrario, internet a aussi permis dans de nombreux cas de diffuser des informations susceptibles de résoudre des affaires criminelles.)
Côte à côte
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Sur l’estran désormais abandonné au vent et à la vague, les grains de sable glissent et effacent promesses et espoirs. Qu’emporte l’océan, des misères et des joies dans son tumulte par delà la ligne d’horizon vers un pays indécis aux nouvelles couleurs. Que chaque syllabe prononcée, que chaque mot calligraphié soient l’accomplissement d’un destin unique. Que les prophéties d’un jour meilleur émergent au point de l’aube et se renouvellent à chaque flux. Sur l’estran de nouvelles promesses sont inscrites, toujours. Elles naviguent enfourchant amoureusement la crête écumeuse de l’océan. Et parfois sur la roche, une vague dépose dans un fracas de neige les bribes de vœux encore tout frais. Alors que le soir pousse à l’ouest un soleil fatigué, les dernières lueurs font scintiller sur le sable tiède le ventre nacré de quelques coquillages.
(Peintures technique mixte : encre, acrylique, huile. Format 50×65 cm)
Morbihan 2021
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Bientôt la fin septembre, signe de mon retour en région parisienne et l’adieu aux paysages du Morbihan. Avec une connexion internet au débit aléatoire, j’ai dû mettre de côté une bonne partie de mes peintures que je livre aujourd’hui aux flux indiscipliné. Pour le coup, ça fait un nombre conséquent de peintures. Une bonne partie des séquences où la mer est présente ont été réalisées en dehors des mois les plus touristiques de l’été. Juillet et août rassemblèrent ici toute une société d’arthropodes. Plages envahies d’insectes à deux pattes, chenilles randonneuses sur le sentier des douaniers, mille pattes motorisés formant une cohorte malodorante à toutes les croisées. C’est comme d’habitude à ce moment là que je me tourne vers l’intérieur des terres, la campagne fraîche aux senteurs odorantes et naturelles. Je reste plus que jamais fidèle à la peinture en plein air pendant ces mois passés dans le Morbihan. Je maintiens au maximum des séances sur le motif d’une durée n’excédant pas deux heures et je réduis au maximum les reprises.
Zoé la clown
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Il existe la Grande “Zoa” et aussi la petite Zoé grimée en clown.
Une transformation qu’elle semble particulièrement apprécier.
Ça faisait un petit moment que je n’avais pas mis ce blog à jour. Voilà l’occasion grâce à cette séance de pose en live via l’application “Zoom” de combler cette lacune. Zoé nous a proposé deux heures de participation avec 2 poses sous trois angles de prises de vues. On en fait vite le tour dès lors que l’on ne se lance pas dans un dessin complexe ou une peinture qui réclame un peu de temps. Pour ma part, adepte du croquis rapide, j’ai doublé ou triplé parfois la même pose sous un angle différent en la reprenant avec des techniques distinctes (encre, fusain, crayons pastels ou aquarelle. Mais bref, cette séance m’aura remis un peu dans le bain, pour une rentrée soit avec du modèle vivant en présentiel…au pire en vidéo live.
Réflexions
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Que c’est une chose charmante
De voir cet étang gracieux,
Où, comme en un lit précieux,
L’onde est toujours calme et dormante !
Mes yeux, contemplons de plus près
Les inimitables portraits
De ce miroir humide ;
Voyons bien les charmes puissants
Dont sa glace liquide
Enchante et trompe tous les sens.
Déjà je vois sous ce rivage
La terre jointe avec les cieux
Faire un chaos délicieux
Et de l’onde et de leur image.
Je vois le grand astre du jour
Rouler dans ce flottant séjour
Le char de la lumière ;
Et sans offenser de ses feux
La fraîcheur coutumière,
Dorer son cristal lumineux.
Je vois les tilleuls et les chênes,
Ces géants de cent bras armés,
Ainsi que d’eux-mêmes charmés,
Y mirer leurs têtes hautaines ;
Je vois aussi leurs grands rameaux
Si bien tracer dedans les eaux
Leur mobile peinture,
Qu’on ne sait si l’onde, en tremblant,
Fait trembler leur verdure,
Ou plutôt l’air même et le vent.
…
L’étang de Jean Racine (Extrait)
Vieux cœur
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La maison dort sous les gouttes. Mélody Gardot me chuchote des mots d’amour si doux. De son gros ventre, une contrebasse expulse en vibrant ses notes suaves. Au grenier une rafale s’infiltre par une ouverture. Surprise, la charpente craque. De gros nuages aux nuances subtiles de l’acier, comme dans un cadre mouvant, défilent par delà les toits. À l’intérieur un mince filet d’air se faufile et fait trembler un voilage, vaciller une flamme. Une goutte sur l’aluminium de l’évier chronomètre le temps qui passe. Inexorable. Le fumet de mon thé noir envahit la pièce et laisse échapper un subtil parfum d’orange. Le jour se lève doucement. Dans la pâleur du petit matin, les chaudes lumières perdent conscience. Le bleu revient combler l’espace de la nuit. La maison commence à s’animer et les tendres pensées des enfants, à jamais gravées, emplissent de leur innocente affection mon cœur vieillissant.
La France libérée
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Depuis plusieurs jours, on n’entendait parler que de liberté à venir pour les français. Nous étions en guerre et je l’avais oublié. La voilà donc cette liberté vendue à grand renfort de communication, d’émissions aux invités tous conviés à afficher leur meilleur optimisme quitte à ce que tout cela paraisse surjoué. Il faut faire repartir l’activité économique et aussi celle des esprits, nourrir le ventre comme le cerveau. Aujourd’hui, mieux que la libération de la France en 1945, il nous faut être joyeux. Allons donc, un peu d’entrain, chassons les esprits chagrins de notre voisinage. Tous sur le pont pour faire la fête. C’est le bonheur qu’on vous dit ! Souriez ! Ah oui, le masque…c’est vrai, ça gâche un peu quand même. Aujourd’hui, pour les français il ne se passe plus rien dans le monde. Les roquettes ne frappent plus, les bombes se posent dans un nuage ouaté, les gens ne meurent plus de faim ou de leurs idées, les dictatures repeignent leur étendards aux couleurs de la gay pride, les noirs ne servent plus de cible…Aujourd’hui le monde est bon. Sur toutes les ondes, sur tous les papiers, sur tous les réseaux, on n’a de mots que pour célébrer le retour à la vie. Trop c’est trop ! Aujourd’hui, on oublie les morts et leurs familles irréconciliables avec le deuil, les personnels hospitaliers écœurés, humiliés, trompés et en colère. On fait l’impasse sur les faillites et les drames personnels de Jean, de Cyril, de Mylène…et de tant d’autres à venir. Non, aujourd’hui, je n’arrive pas à m’unir totalement aux cris de joie (parfois) hystériques de certains. Pour l’instant nous avons gagné une bataille – et encore ! J’attendrai que la guerre soit vraiment finie et la paix définitivement signée.